Bilan de l'année 2015-2016

Seule avec la classe

Gérer une classe alors qu'on ne m'avait jamais appris à le faire n'est pas une chose que je pensais savoir faire tout de suite. Il m'a fallu mobiliser toute ma capacité d'adaptation et d'improvisation l'an dernier pour parvenir à comprendre comment fonctionne une classe, puis à appliquer ce que j'avais compris avec mes élèves. C'est au cours de cette année de stage que j'ai vraiment commencé à pratiquer et à ne pas refaire les mêmes erreurs que la première année. Cette nouvelle rentrée m'a permis de repartir de zéro avec de nouveaux élèves.

Créer une bonne dynamique dans un groupe est passé pour moi par deux éléments fondamentaux :

  1. Être avec la classe et non face à elle
  2. Dès lors que j'ai osé franchir le bureau, m'avancer dans la salle, m'asseoir occasionnellement à côté d'un élève, interpeller chacun personnellement, les réactions ont changé. La proximité physique - sans la présence d'un bureau qui hiérarchise les relations - m'a libérée autant qu'elle a rassuré les élèves : non, je n'allais pas les manger.

    J'évite de donner des ordres directs : "faites cet exercice", "lisez ce texte"... A contrario, pour rester dans ma logique de ne pas m'opposer au groupe, je m'englobe dans le groupe : "on commence par...", "puis nous allons essayer de faire ça", "on devrait pouvoir être capable de..." J'ai vraiment l'impression que mes sixièmes apprécient que je mette parfois à leur niveau, que j'admette que c'est difficile.

  3. Transmettre l'envie d'apprendre
  4. Cette partie a été de soi quand j'ai constaté que les activités qui faisaient oublier à mes classes l'heure de la sonnerie étaient celles que je prévoyais pour les fins de séquences : les jeux. Je détournais des jeux connus pour les adapter aux sixièmes : jeu des 7 familles (transformé en 10 familles pour les classes Dewey), livre-jeu, cocottes en papier en guise de fiches de révision... Comme des récompenses pour leur travail sérieux tout au long d'un chapitre.

    Je me suis finalement demandée qui avait écrit que les récompenses ne devaient arriver qu'après la souffrance. Obligés de venir au collège dès 8h du matin, pourquoi la journée des collégiens ne serait-elle que pénible ? Je considère qu'apprendre ne doit pas faire mal (ou très peu) et qu'un élève heureux d'être en classe aura plus de motivation à travailler et acceptera plus volontiers de se casser la tête pour réussir dans un cours qu'il aime.

    Je me sens tenue de faire passer un bon moment aux groupes auxquels je fais cours. Quand les questions fusent, quand les mains se lèvent pour participer, quand les sourires se mêlent au sérieux et quand les résultats de la classe me surprennent, c'est que j'ai réussi mon pari.

Travail en équipe

Seule, j'aurais eu les plus grandes difficultés à gérer tout ce que doit gérer un professeur documentaliste. Je peux heureusement compter sur une équipe accueillante et ouverte à mes questions, mais aussi à mes propositions. Peu à peu, je me suis immiscée dans des projets auxquels les personnes occupant mon poste précédemment ne participaient pas ou peu (AP, sorties scolaires) et à faire vivre le CDI via des collaborations avec d'autres matières (Concours les P'tites plumes avec français et arts plastiques, séquence sur la traduction avec l'anglais).

Les EPI semblent avoir été créés pour nous, professeurs documentalistes ! Ces projets vont mobiliser toute l'équipe et nous impliquer de facto car, à de rares exceptions, ils nécessiteront l'utilisation du CDI. Je me sens donc incontournable et je pressens un planning pour ma salle autrement plus fourni que jusqu'à présent... Certains des projets menés ou testés cette année vont devenir des EPI (les P'tites plumes par exemple), et j'ai participé à la création de quelques autres.

La première équipe avec laquelle j'ai été amenée à travailler a été la vie scolaire. En effet, le CDI accueille les élèves de permanence qui le demandent. Le point que nous essayons constamment d'améliorer concerne les modalités d'accès à la salle. Trop strictes, personne ne vient. Trop laxistes, n'importe qui vient sans motif valable. Aucune de ces situations n'est satisfaisante et c'est pourquoi le choix actuel, en position médiane, semble convenir. Après quelques tâtonnements, je me sens enfin en mesure, en collaboration avec la vie scolaire, de rédiger un petit mémo à destination des surveillants et qui définirait précisément les priorités d'accès au CDI.

Des élèves tous différents

J'ai commis ma première erreur avant même la rentrée, dont je me suis vite aperçue. J'avais préparé une progression identique pour toutes mes classes. Mon erreur a été de vouloir à tout prix la suivre. Or, les collégiens ne sont pas des robots qui fonctionnent tous de la même manière ni à la même vitesse. Pourtant, j'aurais dû le savoir : j'ai un temps été AVS...

Constatant qu'au fil des séances l'écart se creusait entre les très bons et ceux qui sont en difficulté, j'ai essayé de construire au maximum des activités qui sont réalisables dans le temps imparti par les plus lents, et qui sont complétées par des approfondissements pour les autres. Autrement dit, j'ai choisi de faire réussir tout le monde

Ma politique d'acquisition s'est elle aussi tournée vers les différences puisque j'ai commencé à investir (modestement pour l'instant) dans des ouvrages destinés aux dys (cahier de soutien, dictionnaire phonétique) et je souhaite poursuivre cet effort par la suite.

Adaptation

Je pense que c'est un des maîtres mots du métier. Si on ne sait pas s'adapter - au niveau des élèves, au temps, aux imprévus - on ne peut pas progresser. Ma capacité d'improvisation a été mise à rude épreuve quand j'ai appris quelques jours avant de commencer que j'allais devoir donner des cours alors que je pensais juste devoir gérer le CDI et accueillir des élèves en fonction des besoins. C'est maintenant cette partie du métier que je préfère, justement parce qu'elle requiert une réactivité à toute épreuve, a fortiori quand on a en face de soi des sixièmes très spontanés et curieux.

Ce que je veux devenir

Le peu d'expérience accumulée me conforte dans le fait que je veux devenir cette enseignante qui donne envie aux élèves de venir en cours et de s'investir dans des projets qui les motivent. C'est une façon pour moi de rendre à l'enseignement catholique une partie de ce qu'il m'a offert quand j'étais élève. Je pense avoir pris la bonne voie pour atteindre ce but et mes efforts tendent à améliorer encore ma pratique.

Intellectuellement, un professeur documentaliste a de la chance : il n'a ni programme écrit noir sur blanc, ni manuels. Oui, c'est une chance ! Même si la plupart d'entre nous ont des progressions similaires, la possibilité d'en dévier reste permise, d'où le fait que j'ai commencé l'initiation au code. C'est très stimulant de devoir créer sans arrêt, expérimenter, lancer des projets. La quasi-absence de contrainte oblige à être en constante recherche de nouveautés et empêche de s'endormir sur ses acquis. De même, la discipline (l'Education aux Médias et à l'Information) concerne des domaines en perpétuelle évolution.

La veille est indispensable pour rester à jour et ma curiosité est sans cesse stimulée par le bouillonnement de l'actualité et des innovations.